En petite série

289 #3

Pas à pas

Sur son front un trou.
Un trou d’eau.
Un trou dans la tête.
Ton ventre sur son dos. Elle aime bien.
Ses mains sur tes épaules. Il aime bien.
Les doigts entre les doigts.
Mouvements ralentis.
Du bout des lèvres.
Tout devait arriver.
Comme les carrés un mardi 19.
Ils sont bien faits. Achevés et pliés.
Derrière ton cou elles s’échappent.
Mâchoires serrées elles te relâchent.
Sèchement. Tendrement.
L’homme rit sous sa capuche.
Un long voyage.
Un goût d’autres choses.
Des jolis coins, des sueurs, des caprices.
Un vœu pieu. Une flèche noire.
Au bord du canal les tarifs sont tus.
Du haut des collines les oranges roulent.
Tombe la neige.
Une cellule douce inoxydable.
Marques confondues. Mots griffés.
Un service complet. 42 pièces.
Une table à dresser.
Un message adressé.
Le pli n’est pas ouvert.
Chambre 109.
La lumière est éteinte.
L’économie d’une batterie.
La page reste sage.
Un pas de côté. Un pas chassé.
Un moment décalé.
Aucune odeur sur son flanc.
Aucun reflet sur sa lame d’argent.
Le mirage s’est évaporé.
Des pas sur la neige la nuit sur le sable.
Deux anneaux, un oiseau.
Pas à pas.
Une mauvaise manipulation.
Une longue supposition.
Un liseré bordé.
Les paupières abandonnées.
Courir à la mer la nuit la tête sous la neige.
Un point bleu.
Une décharge sur la nuque.
Un flash dans un coin.
Sans contour l’espace est blanc.
Alentour le printemps est en hiver.
Les coquilles craquent sur son crâne.
Rue des lilas la glycine fait la fête.
Le cardinal siffle dans les airs.
Une poignée. Un trophée.
L’œuf est cuit. L’instant aussi.
Anesthésié, atrophié.
Étendu, il vibre dans sa boîte.
Paisiblement.
Les joues rosies. Les lèvres arrondies.
Un mauvais contact.
Sueurs perlées au front.
La forme de l’eau goutte.
La jetée verte surplombe.
La nuit dans la forêt, un sursaut.
Le toit s’ouvre. La fenêtre tombe.
La pluie s’engouffre.
Inexorablement.
Les feux sont en détresse.
Un fonctionnement inversé.
Une position contrariée.
Une tempête. Un freinage.
3 biches. Deux puis une.
La batterie est vide.
Les rideaux sont fermés.
La porte est verrouillée.
3 coups métalliques. Un sourire encadré.
Un chargement, une connexion, une courtoisie.
De détours en détours.
Les routes se perdent, se croisent et se barrent.
La voiture s’éloigne.
Je me tais. Elle se tait.
Dans le couchant. Vrombissant.
Son souffle est bleu.
Le compteur s’est emballé.
Des questions entrecoupées.
Le souffle est court ce matin.
Un rappel. Une ultime piqûre.
Un camion rouge à l’arrêt.
Au bord du vide il t’attend.
Autrement.
Ses yeux dans tes yeux.
Une fausse route.
Crue et soudaine.
Une équivalence. Une ambivalence.
Le jaune ne s’écoulera plus.
Les dépôts sont retenus.
Pas de goût de terre.
Ni même au bout des doigts.
Un gris poussiéreux.
Le volant est maîtrisé. Le regard figé.
Les paumes douces sont posées.
Aucune oxydation attendue.
Du bout du pont j’avance.
Un jardin trempé. Un jardin détrempé.
Un pas en bas, un pas en haut.
La voix est là.
Une direction coordonnée.
Parfaitement.
Le liseré fin s’efface.
Comme sur un nuage.
Son lit est vide.
Tête pivotante, ce n’est pas lui.
Il roule sous les arbres.
Débranché.
Le vent s’engouffre. Il pleut dedans.
La main ne sortira pas. Pas par là.
Le geste est contrit.
Depuis l’enseigne a fermé.
Ni de cuisine. Ni d’homonyme.
Une bonne fin. Un mauvais début.
Un regard croisé du fond des toilettes.
Difficile et dommage.
Une proposition. Deux possibles.
Vitre gravée 12:12.
Un paraphe en fin de page.
Une prédiction. Un contrat.
Malvenu. Non avenu.
Une lumière.
Juste un peu. Juste assez.
Les idées s’y glissent.
Les rêves aussi.
Survivront ou pas.
Les promises sont toxiques.
Elles dégoulinent.
Lentement.
La bouche essuyée.
Les paroles contrôlées.
Ce soir le poil roux est court.
Dans le rang en courant.
Le temps est tard. L’air est frais.
Un joli bateau. Un joli radeau.
Touché, codé.
Une chemise portée. Une chaine bouclée.
L’horloge est jaune.
Un carré blanc. Immaculé, chiffonné.
Une fumée s’élève.
Au loin dans un coin.
Le requin a fini. Le lion a rugi.
Une ligne, un chiffre, une virgule.
22 décimales à suivre.
Une règle d’or.
Le ciel est noir. Les roses sont roses.
Du bout de la table.
Les points sont alignés.
Allongée sur un tronc mouillé.
Glissée dans les bottes.
Côte à côte ils gigotent.
Le vide tout autour.
Rien pour les retenir.
L’os hyoïde va bien.
Sans jamais cesser ils remuent.
De mur en mur, un tic-tac sourd.
Hors de portée, une lueur saisie.
Sans jamais cesser. Sans effet.
Brutalement.
Elle s’engouffre dans la carcasse.
Elle et ses remouds. Froide et sombre.
Prisonnières. Tête à l’envers.
Elles se turent.
Deux drôles de formes circulaires rouges, accompagnant une série de textes de Caroline Pandelé, édités par Magazine Aléatoire.

Caroline Pandelé convoque, dans le désordre : coïncidences, intimité, fragilités, fragments de vies, mémoire, narrations visuelles, captations photographiques ou sonores… dans l’ordre : une œuvre. L’enveloppe mince de nos existences sensibles. Caroline Pandelé, artiste, vit et travaille. 

En savoir plus : www.carolinepandele.com

Lire aussi : Ne prends pas peur289 #7 — 289 #6 — 289 #5 — 289 #4 — 289 #2289 #1 — Petite histoire achevée d’un carré de porc, là‐bas, un vendredi 19

Texte et image : Caroline Pandelé.
11/2019

Et plus longuement…

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289 #7. Caroline Pandelé

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Aujourd’hui j’ai avalé un ange. Corinne Deniel

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