En petite série

289 #6

Fraise Framboise

Comme ça.
Une cédille. Juste.
Juste une cédille.
Comme ce jour-là.
Après coup. Un écart.
Une tache. Deux taches. Trois taches.
Dans sa bouche.
Souffle coupé.
Le point rouge se déplace.
Une marque. Un trait.
Tracer des traits.
Dans le vide, sur la feuille, sur la peau.
Le geste est lent, contrit et précis.
Elle commençait à gonfler.
Évidée et tendue.
La peau du bout du doigt.
Une immersion.
Une nuit sous un pont.
Sous une pluie de confettis.
Date arrêtée. Site localisé.
De clapotis en clapotis.
Une disparition à 5 faces.
Entre chien et loup.
Une vision.
De sa place, de sa table, de sa fenêtre.
Elle coule.
Ses lèvres forment un mot.
Les choses sont remontées.
Il dit.
C’est dit. C’est écrit.
Dernière ligne. Dernier chapitre.
Un chant sans fin.
En un seul endroit.
Il passe, il flotte et s’élève dans les airs.
Comme un ballon.
Comme un camion.
Entre deux buissons entre deux lions.
Ça résonne comme un sermon.
Comme deux trois airs de rien.
Comme il aime à l’écrire.
Comme il aime à reprendre.
Trois lettres discursives.
En titre. En corps.
Une injonction.
Une fois. Deux fois. Trois fois.
Ça crève les yeux.
L’air de rien.
Suivre les points noirs.
Aller à la forêt. Atteindre la forêt.
Rentrer dedans. Rester dedans.
Et attendre.
Sur le banc.
Étendue. Détendue.
Souffle bloqué.
Tout va bien.
Une minute. Deux minutes. Trois minutes.
Respirer. Cesser.
Le rêve déborde à l’envers.
Épinglé au plafond.
Il dégueule.
Au fond de l’évier.
Des bulles.
Par trois.
Décolorées. Entrelacées.
Comme des visages venus d’ailleurs.
Marqués au couteau.
Une inscription.
Une tache. Deux taches. Trois taches.
Tout le long. Sur le pont.
Le point se déplace.
La nuit est écarlate.
Comme ça.
Comme ce jour-là.
Les roses ne parlent pas.
Piquent et pêchent.
Où quelque chose comme ça.
Pic. Poc.
Une drôle de petite chanson.
Résonne sur la tôle du toit pointu.
Une petite chose.
Entre deux phrases.
À deux pages d’intervalles.
Une réponse qui ondule.
C’est une question.
C’est un poisson.
Un petit poisson.
Un tout petit poisson.
Une friture coincée entre les dents.
Le caillou plonge.
Un trou dans l’eau.
Le choc de la bouche qui crève la surface.
Dans la bouche des bulles.
Bulles éclatées.
La crainte ténue que quelque chose morde.
Il dit beaucoup de choses.
De ça, il ne dit rien.
Une chose attire le regard.
Une forme assise de l’autre côté.
Une boule.
Fraise Framboise.
Une voie. Une issue.
Du fond de la cour.
Le mur est courbe.
Du vert de gris au gris rosé.
Comme ça.
Comme des fraises à la crème.
Décapitées. Piétinées.
La ligne est sautée.
Deux fois.
Deux lignes en-dessous.
Les fraises font des trous.
Sous la table ou dans les bois.
Le gras remonte.
Le jus se fige.
Des plaques se forment.
Le liquide devient solide.
Le décompte est lancé.
À la volée ou en portée.
Il cherche.
Une rivière qui coulerait dans les deux sens.
Le caillou pénètre l’eau claire.
Le caillou à la tête de clou.
Un clou droit.
Au bout duquel sont suspendues ses pensées.
Un coup sec.
Joues bleuies.
Trois pommes dans la mare.
Rouge tomate.
Un point à suivre.
Une cédille. Juste.
Comme ça.
Comme ce jour-là.
Ou quelque chose comme ça.
Pic. Poc.

Câbles sous emprise, une image accompagnant une série de textes de Caroline Pandelé, édités par Magazine Aléatoire.

Caroline Pandelé convoque, dans le désordre : coïncidences, intimité, fragilités, fragments de vies, mémoire, narrations visuelles, captations photographiques ou sonores… dans l’ordre : une œuvre. L’enveloppe mince de nos existences sensibles. Caroline Pandelé, artiste, vit et travaille. 

En savoir plus : www.carolinepandele.com

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Texte et image : Caroline Pandelé.
05/2022
Et juste après…
Aujourd’hui j’ai avalé un ange. Corinne Deniel

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289 #2. Caroline Pandelé

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Sous la fleur du plafond. Corinne Deniel

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289 #3. Caroline Pandelé

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289 #4. Caroline Pandelé

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289 #5. Caroline Pandelé

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Mon cœur a envie d’une mangue. Corinne Deniel

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