Nuits américaines

Ripley Bogle, Robert McLiam Wilson

« La vaste et tonitruante musique du paysage joue pour moi et je respire largement, loin du mur et du toit. Je jouis d’une espèce de liberté. Mes nuits sont longues et austères, parsemées de lumières et d’incidents. Quel sédentaire pourrait s’en vanter ? Un certain nombre, je vous l’accorde. »

Prénom
Un chemin coléreux.

Nom
Embarrassant, mais pas impossible.

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L’animation a décru avec la chaleur, l’après-midi agonise. Le samedi, les fins d’après-midi sont toujours comme ça. Bizarres, abandonnées, semblables aux limbes. Dépourvues de charme, inquiètes, idéales pour les résultats de matches de football et pour se préparer en vue des excès de la nuit. Ce n’est jamais une heure agréable. Composée de poussière, d’odeur de bière, d’ennui, elle me déprimait toujours quand j’étais gosse. Et ce qui m’arrive maintenant. L’odeur prolétarienne du fer à repasser, la lueur plate et fade.

« L’abus d’alcool n’est qu’un des Vassaux dans la Tragédie de la Revanche que joue mon corps chaotique. »

Adresse
Mais ici, à Hyde Park, le père soleil a lourdement trébuché dans son escalier aérien. Une tâche brillante, mais de plus en plus petite, domine encore un groupe d’immeubles élevés et lointains. Nous restons dans la lumière. Le pinceau linéaire et poisseux effleure la terre et découpe des ombres précises entre les silhouettes des bâtiments, des arbres, de la foule. Des flaques brutales de reflets bas éblouissent l’œil. Gêné, je grimace et tourne la tête pour éviter cette douleur à mes yeux.

Profession
Sous un arbre tout proche et lumineux, j’avise un collègue, un mendiant.

Situation de famille
Oui. Encore raté. Une autre occasion de perdue. Après tout en valait-elle la peine ? Il y avait une kyrielle de filles ravissantes à draguer. Qui avait besoin d’elle ?
Moi.

Signes particuliers
Tu tentes désespérément de mettre un peu de sobriété dans ton dénuement. Tes vêtements ne sont pas encore des haillons, mais tu ne réussis plus à convaincre. Chacun lit sur toi la tâche révélatrice de l’absence de but. Tu ne l’enlèveras jamais, mon ami. N’essaie même pas. Ça te briserait le cœur.

Un personnage traversant une rue à Londres.

Robert McLiam Wilson. C’avait été un tel gâchis, mon enfance, ma jeunesse, tout y avait été si affreux – le truc de la pauvreté, le truc de l’Irlande – et j’avais survécu à toutes ces épreuves comme un cow-boy en contreplaqué.

Paru chez Christian Bourgeois en 1996, traduit de l’irlandais par Brice Mathieussent. Réédité en poche chez 10–18.

Tom Sergent. Depuis qu’il a retrouvé un morceau de contrôle, l’air de Tom s’est raréfié au point qu’il a séché, intégralement. Sa femme l’aime sans rien faire, il y a toujours eu comme un flottement et des papiers froissés. Un jour, ce monsieur m’a acheté un petit morceau de lard.

Lire aussi : Bienvenue à Oakland, Eric Miles Williamson — Le Diable tout le temps, Donald Ray Pollock — Stone Junction, Jim Dodge

Extraits choisis : Tom Sergent — Image : Gary Heayes, Crossing, Openphoto.
03/2020

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