Tendre ampoule électrique

Caresse

J’effleure ta joue avec ma main gauche. Et je pense qu’il faudrait parler de l’impasse politique de la vanité devenue norme la pornographie un repère solide des coïts qui se voudraient ininterrompus de l’économie des images des selfies obsessionnels des injections de botox et de javascript de la violence sociétale l’unique sample qui fait tourner les têtes la technologie militaire dans nos mains tous les jours avec un fusil d’assaut à portée de carte bancaire mais ce qui vient c’est la douceur de la peau de mémé cette douceur discrète qui perdure dans le rêve des murs à repeindre couleur saumon la nourriture de fin de repas qui jonche les tables et les sols la lumière qui abonde dans les lambeaux de peinture blanche un peu partout c’est la mue la peau de pêche à vif le collant couleur chair de mémé le soleil dans son regard et puis il y a celle qui fouille partout qui aurait aimé continuer à vivre là dans une absolue volonté de tout redimensionner elle est au milieu la peau du décor qui change indéfiniment un sursaut salvateur à chaque mur du son qui fait trembler les portes et elle se dit qu’elle devrait venir plus souvent ce n’est pas si loin de la gare après tout et puis la gorge en forme d’abricot de la voisine lui rappelle le velours, les rubans, le tissu d’hiver enveloppant mais aussi la colline qu’on ne trouve que par temps estival des centaines de petites graminées blondes dessus j’essaie de me souvenir si le goitre tant convoité n’était pas cette béance à combler la solitude à contenir dans ma paume si sa couleur me plaisait je me souviens des mains hâlées débordantes sur ma peau unilatéralement assumées et espérées entre les raies torpilles tuées à coups de marteau des mains subreptices et habiles comme autant de coups tordus à la lame acérée qui finissent par déformer les sillons digitaux et rendre la vérité méconnaissable des excoriations psycho dermiques tombant en pluies éparses sur des cheveux retenus avec des pinces à linge sur des sourires humides mentons prognathes des yeux plongés dans la soie des cercueils parmi les définitions introuvables des mots croisés le fracas des dents sur le sol le nez qui se fêle les tours qui tombent dont les seuls survivants sont des enfants. J’effleure ta joue avec ma main gauche.

Ta joue de ma main gauche… « Caresse », Egret Esbrenner pour Magazine Aléatoire.

Egret Esbrenner écrit aussi des textes en paquets, en tâches ou en forme de nævus. Elle aime les anagrammes et brûler la glace. A pignon sur ciel et a décidé de s’y mettre, tous regrets en berne.

Lire aussi : WifiAnathème

Texte et image : Egret Esbrenner.
02/2025

Et aussi…

Ne prends pas peur. Caroline Pandelé

Ne prends pas peur. Caroline Pandelé

Chut chut. Rolino Gaspari

Chut chut. Rolino Gaspari

Ce que le soleil peut #1. Jean-Luc Aribaud

Ce que le soleil peut #1. Jean-Luc Aribaud

Mercredi 30. Bernard Teulon-Nouailles

Mercredi 30. Bernard Teulon-Nouailles

Édouardi 13. Bernard Teulon-Nouailles

Édouardi 13. Bernard Teulon-Nouailles

Écrire. Bruno Guittard

Écrire. Bruno Guittard

Garde-meuble. Bruno Guittard

Garde-meuble. Bruno Guittard

Chambrette. Zoé Viala

Chambrette. Zoé Viala